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RHYS CHATHAM
Lausanne (ch), Circuit - 07.06.2008
LP Guitar Trio (1977), Catalogue LA CHUTE D'EAU

» COMPTE RENDU
le 09.06.2008 à 06:00 · par Gaëtan S.

En mars dernier, Radium (la division rock du prestigieux label Table of the Elements) sortait un triple album de Rhys Chatham composé du même morceau, joué dix fois. Sous le titre Guitar trio is my life!, que l'on espère ironique, se cache ainsi le fameux morceau datant de 1977, Guitar trio, qui consiste à jouer un mi à la guitare (entre trois et plus de dix) pendant plusieurs minutes, accompagné d'une basse et d'une batterie. Ainsi, le compositeur new-yorkais s'est offert l'an dernier le luxe de jouer ce morceau dans huit grandes villes nord-américaines avec un line-up local. Il est accompagné de Sonic Youth, Alan Licht et Jonathan Kane à New-York. A Chicago, c'est la fine fleur de Tortoise, Brokeback et Lichens qui l'entourait, et il retrouvait les membres de Godspeed You! Black Emperor à Montréal ou Tony Conrad à Buffalo, pour ne citer que les plus illustres collaborateurs. Malgré le fait que tous jouaient le même morceau, le résultat s'avère relativement hétéroclite, et l'exercice moins convenu et plus compliqué qu'il n'y paraît. Il s'agit de ne pas partir sur un faux rythme et surtout, de le tenir pendant deux fois vingt minutes. Paradoxalement, c'est au batteur que revient la tâche la plus ardue et la plus grande créativité, malgré la consigne de ne jouer que du charleystone pendant la première partie.

C'est ainsi que Rhys Chatham continue sa tournée des grands ducs en Europe. Après une date à Paris le mois dernier (organisé par Ali_Fib), le voici à Lausanne. Composé de six guitares, plus une basse et une batterie, le line-up est cette fois-ci composé de l'intégralité d'Honey for Petzi, Valérie Niederoest et Maude Oswald de Toboggan, ainsi que Franziska Staubli et Eloise de Breteuil, ce qui nous donne une parité remarquable. Moins prestigieuse que celles entendues sur disque, cette formation offre à Rhys Chatham une crue de jeunesse tout à fait appréciable. Distribuant les rôles de chacun en direct, la première partie est hypnotique. Les guitares s'ajoutent les unes après les autres, offrant de rares variations, la basse tient le rythme avec une batterie courageuse et endurante, ne devant se contenter que de son charleystone. La matière se construit et se façonne petit à petit et la répétition prolongée sous forme d'une lente montée fait perdre toute notion du temps. L'espace (ici la galerie d'art Circuit et sa grande salle aux murs de béton nus et au plafond haut) n'y est pas pour rien dans cette réussite, permettant au son de se réfléchir partout et de prendre possession du lieu. Après vingt minutes et une présentation des musiciens, la deuxième partie commence. Sauf que cette fois, la batterie a une totale liberté. Heureusement pour nous, derrière les fûts se tient Christian Pahud d'Honey for Petzi. Avec une précision métronomique et une frappe sèche et lourde, il se lance dans un véritable marathon et un festival. Rythme martelé, breaks endiablés, il se permet tout, de tenir le morceau à bout de baguette et de le projeter dans la grande salle avec une énergie incroyable, de passer d'une rythmique frénétique à quelque chose de bien plus lourd. D'ailleurs, Rhys Chatham et le public ne s'y trompent pas, et c'est la première personne que le maître de cérémonie félicite une fois la furie du morceau retombée. Car cette deuxième partie de Guitar trio est montée très haut, très fort, balayant l'espace d'une énergie monumentale. Alors que l'on doutait quelque peu de la forme du papy new-yorkais, voilà qu'accompagné de la jeune scène lausannoise, il retrouve des couleurs bienvenues et une fougue insoupçonnée. Le résultat n'a pas à rougir, loin de là, des prestations entendues sur enregistrement.
Considéré soit comme une œuvre d'art ou un énorme foutage de gueule, Guitar trio version Lausanne 2008 n'a été ni l'un ni l'autre, mais un vrai moment rock. Et du très bon, assurément.

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